8 jours que le confinement général a été mis en place, 12 jours que nous ne sommes pas sortis de chez nous.
Par « chez nous », je veux dire de la maison et du jardin de 300m2. Car nous sommes extrêmement chanceux ! Nous vivons dans un petit village de la Haute Somme, au milieu des champs. Nous avons 3 filles scolarisées en centre ville ou mon mari travaille également. Je suis enseignante en maternelle dans un petit village situé à 10 minutes de chez nous.
Les premiers jours ont été un peu chaotiques… Il y a eu le choc de l’annonce de la fermeture des écoles et de la décision de confinement général quelques jours plus tard, il a fallu prendre de nouveaux repères. Exit les allers retours quotidiens en centre ville à 25 kms d’ici et les longs trajets en voiture pour les filles. Exit le lever à 6h45 et les devoirs du soir, les activités extra scolaires. Tous les rendez vous chez les différents spécialistes sont annulés et reportés à…
Maintenant c’est maman qui fait la classe pour les trois niveaux (c’est pas comme ci ce n’était pas son métier lol) tout en gardant le contact avec sa « vraie » classe et papa télétravaille dans son bureau toute la journée. La charge de travail est importante alors pour ne pas se laisser submerger et ne pas dégoûter les enfants, je décide de lisser le travail scolaire sur 6 jours. Le dimanche reste une journée OFF. On travaille un peu le matin, un peu l’après midi. Entre deux, les filles gèrent leur temps comme elles veulent entre jeux à l’extérieur, dans la salle de jeux ou dans leurs chambres. Ici pas de jeux vidéos et pas de téléphone ni tablette pour les enfants de 6, 9 et 12 ans.
Au milieu de tout ça, il reste le ménage, la lessive, la gestion des repas. C’est ce dernier point qui me préoccupe le plus car à 5, les stocks s’épuisent rapidement si on n’est pas vigilant. Mon mari et moi ne mangeons pas beaucoup et les filles prennent les mêmes portions que nous, elles ont toujours eu bon appétit. Donc c’est comme si il y avait à la maison 5 mangeurs moyens. J’ai pris l’habitude, depuis des années, de cuisiner 7 parts par repas pour que nous adultes ayons notre déjeuner le lendemain midi au boulot. Je continue, et nous gardons les parts supplémentaires pour un repas où nous mangeons donc tous ou presque quelque chose de différent. Nous ne jetons jamais rien en temps normal et c’est encore plus indispensable aujourd’hui.
Je déteste faire les courses alimentaires. C’est une corvée que je laisserai bien à quelqu’un d’autre mais comme je suis la seule à cuisiner à la maison, la question ne se pose même pas… En plus c’est lourd, il faut manipuler plusieurs fois les articles et surtout il faut trouver du temps pour les faire.
Nous avions une avance de 15 jours pour les courses comme c’est souvent le cas et c’est pour ça que jusqu’à aujourd’hui, nous n’avons pas eu besoin de mettre le nez dans la rue. Mais après 15 jours de repas midis et soirs, de goûters, les produits frais et la viande viennent à manquer. Heureusement nous avons anticipé et préparé et envoyé notre commande drive dans notre supermarché habituel il y a 7 jours et le premier créneau pour aller les chercher , c’était aujourd’hui en début d’après midi. Il est hors de question pour nous de nous rendre à l’intérieur du supermarché. Cela me ferait courir beaucoup trop de risques en tant que personne fragile. Je vous tiens au courant de la réception de la commande… je me doute déjà que des produits seront manquants…
Il y a 12 jours que nous sommes confinés et pour l’instant personne n’est malade à la maison. A part des nez qui coulent au retour du jardin, RAS ! Et à J+12 c’est un vrai soulagement pour nous, car même si nous sommes porteurs du virus, je pense qu’a priori nous sommes porteurs sains. Mais nous restons des vecteurs de la maladie donc dangereux pour les autres. En plus, toute sortie dans un supermarché équivaut pour nous à remettre les compteurs à zéro soit 14 jours nouveaux jours d’angoisse.
Pour les filles le temps file vite je crois. En tous cas à part pour la classe, les bains et les repas, je ne vois pas le bout de leur nez. Mon mari travaille devant son ordinateur toute la journée 5 jours sur 7. ça me laisse pas mal de temps pour cogiter… Je cogite déjà beaucoup en temps normal mais là la courbe est exponentielle. En faisant n’importe quelle activité, mon esprit tourne en boucle. C’est le cas j’en suis sûre de beaucoup d’entre nous. Alors j’évite les réseaux sociaux au maximum mais difficile d’avoir des nouvelles des autres sans tomber sur d’autres choses… On n’allume plus la télé sauf pour regarder des films et des séries. Le seul moment où mon esprit décroche c’est quand je lis. Je suis une dévoreuse de livres depuis toujours et j’arrive en lisant à m’enfermer dans un autre monde. C’est mon secret pour couper contact avec les choses qui fâchent. Rester chez moi, j’ai l’habitude. La maladie m’oblige bien souvent à passer des semaines voire des mois à la maison alors j’ai appris à m’occuper et ce n’est pas un problème pour moi le confinement.
Ma classe et mes 31 petits élèves me manquent. Beaucoup… Je travaille normalement 3 jours par semaine.
Mes activités bénévoles me manquent. J’y fais de très belles rencontres..
Le sport me manque. Bien sûr je cours et je marche sur le tapis. Les longueurs de piscine, les cours de pilates…
Mes amis me manquent. Mes collègues me manquent. Même les visites à l’hôpital me manquent… Et surtout ma famille me manque. Heureusement, on prend des nouvelles les uns des autres chaque jour et tout le monde va bien.
Les nuits tranquilles me manquent. Tous ces cauchemars… Il y a deux nuits j’ai rêvé que le virus surgissait du coffre de la voiture après les courses.
Je me balade en ville dans mes rêves et fais le shopping que j’aime tant.
Je rêve à nos vacances…
Je me cache le fait que beaucoup de gens que je connais ne seront plus là après.
Aujourd’hui est une bonne journée…